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au roi qu’elle allait le faire, était partie pour Paris. La comtesse avait là, dans la rue de Valois, un petit hôtel qui servait de pied à terre à toute cette famille, sans cesse courant par monts et par vaux, lorsque les affaires commandaient ou que les plaisirs retenaient.

La comtesse s’installa chez elle, prit un livre et attendit.

Pendant ce temps, le vicomte dressait ses batteries.

Cependant la favorite n’avait pas eu le courage de traverser Paris sans mettre de temps en temps la tête à la portière. C’est un des instincts des jolies femmes de se montrer parce qu’elles sentent qu’elles sont bonnes à voir. La comtesse se montra donc, de sorte que le bruit de son arrivée à Paris se répandit, et que, de deux heures à six heures, elle reçut une vingtaine de visites. Ce fut un bienfait de la Providence pour cette pauvre comtesse, qui fût morte d’ennui si elle était restée seule ; mais, grâce à cette distraction, le temps passa en médisant, en trônant et en caquetant.

On pouvait lire sept heures et demie au large cadran lorsque le vicomte passa devant l’église Saint-Eustache, emmenant la comtesse de Béarn chez sa sœur.

La conversation dans le carrosse exprima toutes les hésitations de la comtesse à profiter d’une aussi bonne fortune.

De la part du vicomte, c’était l’affectation d’une certaine dignité de protectorat et des admirations sans nombre sur le hasard singulier qui procurait à madame de Béarn la connaissance de madame du Barry.

De son côté, madame de Béarn ne tarissait point sur la politesse et l’affabilité du vice-chancelier.

Malgré ces mensonges réciproques, les chevaux n’en avançaient pas moins vite, et l’on arriva chez la comtesse à huit heures moins quelques minutes.

— Permettez, Madame, dit le vicomte laissant la vieille dame dans un salon d’attente, permettez que je prévienne madame du Barry de l’honneur qui l’attend.

— Oh ! monsieur, dit la comtesse, je ne souffrirai vraiment pas qu’on la dérange.

Jean s’approcha de Zamore qui avait guetté aux fenêtres du vestibule l’arrivée