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— Non ; j’étais trop heureuse.

— C’est que, vois-tu, Lorenza, continua le comte, la princesse croit qu’on t’a fait violence. On lui a dit que tu me haïssais.

Et en disant ces paroles, le comte prit la main de Lorenza.

Le corps de la jeune femme frissonna tout entier de bonheur.

— Moi, dit-elle, te haïr ! Oh ! non ; je t’aime. Tu es bon, tu es généreux, tu es puissant !

— Et depuis que tu es ma femme, dis, Lorenza, ai-je jamais abusé de mes droits d’époux ?

— Non, tu m’as respectée comme ta fille, et je suis ton amie pure et sans tache.

Le comte se retourna vers la princesse, comme pour lui dire : « Vous entendez ? »

Saisie d’épouvante, Madame Louise avait reculé jusqu’aux pieds du Christ d’ivoire appliqué sur un fond de velours noir au jour du cabinet.

— Est-ce là tout ce que Votre Altesse désire savoir ? dit le comte en laissant retomber la main de Lorenza.

— Monsieur, monsieur, s’écria la princesse, ne m’approchez pas, ni elle non plus.

En ce moment, on entendit le bruit d’un carrosse qui s’arrêtait à la porte de l’abbaye.

— Ah ! s’écria la princesse, voilà le cardinal ; nous allons savoir enfin à quoi nous en tenir.

Le comte de Fœnix s’inclina, dit quelques mots à Lorenza, et attendit avec le calme d’un homme qui aurait le don de diriger les événements.

Un instant après la porte s’ouvrit, et l’on annonça Son Éminence M. le cardinal de Rohan.

La princesse, rassurée par la présence d’un tiers, vint reprendre sa place sur son fauteuil, en disant :

— Faites entrer.

Le cardinal entra. Mais il n’eut pas plus tôt salué la princesse, qu’apercevant Balsamo :

— Ah ! c’est vous, monsieur ! dit-il avec surprise.