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travers mes paupières fermées, je voyais tout comme si mes yeux eussent été tout grands ouverts.

« On me prit et l’on me déposa dans le cercueil.

« Puis, le visage découvert, comme c’est l’habitude chez nous autres Italiennes, on me descendit dans la chapelle et l’on me plaça au milieu du chœur, avec des cierges allumés tout autour de moi et un bénitier à mes pieds.

« Toute la journée les paysans de Subiaco entrèrent dans la chapelle, prièrent pour moi et jetèrent de l’eau bénite sur mon corps.

« Le soir vint. Les visites cessèrent ; on ferma en dedans les portes de la chapelle, moins la petite porte, et la sœur infirmière resta seule près de moi.

« Cependant une pensée terrible m’agitait pendant mon sommeil ; c’était le lendemain que devait avoir lieu l’enterrement, et je sentais que j’allais être enterrée toute vive, si quelque puissance inconnue ne venait à mon secours.

« J’entendais les unes après les autres les heures : neuf heures sonnèrent, puis dix heures, puis onze heures.

« Chaque coup retentissait dans mon cœur ; car j’entendais, chose effrayante ! le glas de ma propre mort.

« Ce que je fis d’efforts pour vaincre ce sommeil glacé, pour rompre ces liens de fer qui m’attachaient au fond de mon cercueil, Dieu seul le sait ; mais il le vit, puisqu’il eut pitié de moi.

« Minuit sonna.

« Au premier coup, il me sembla que tout mon corps était secoué par un mouvement convulsif pareil à celui que j’avais l’habitude d’éprouver quand Acharat s’approchait de moi ; puis j’éprouvai une commotion au cœur ; puis je le vis apparaître à la porte de la chapelle.

« — Est-ce de l’effroi que vous éprouvâtes alors ? demanda le comte de Fœnix.

« — Non, non, ce fut du bonheur, ce fut de la joie, ce fut de l’extase, car je comprenais qu’il venait m’arracher à cette mort désespérée que je redoutais tant. Il marcha lentement vers