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persuadée encore que Lorenza Feliciani et la comtesse de Fœnix sont une seule et même personne ?

— Non, je l’avoue, dit la princesse, et vous avez deviné juste, monsieur ; ma conviction n’est point entière sur ce point.

— Votre Altesse veut-elle donner l’ordre que Lorenza Feliciani soit amenée devant elle, et alors elle ne conservera plus aucun doute. Je demande à Son Altesse pardon d’insister ainsi ; mais je suis tendrement attaché à cette jeune femme, et elle-même regrette, je crois, d’être séparée de moi.

— Le croyez-vous ? — Oui, Madame, je le crois, si pauvre que soit mon mérite.

« Oh ! pensa la princesse, Lorenza avait dit vrai, et cet homme est effectivement un homme dangereux. »

Le comte gardait une contenance calme et se renfermait dans la plus stricte politesse de cour.

— Essayons de mentir, continua de penser Madame Louise. Monsieur, dit-elle, je n’ai point à vous remettre une femme qui n’est point ici. Je comprends que vous la cherchiez avec tant d’insistance, si vous l’aimez véritablement comme vous le dites ; mais, si vous voulez avoir quelque chance de la trouver, cherchez-là ailleurs, croyez-moi.

Le comte, en entrant, avait jeté un regard rapide sur tous les objets que renfermait la chambre de Madame Louise, et ses yeux s’étaient arrêtés un instant, rien qu’un instant, c’est vrai, mais ce seul regard avait suffi, sur la table placée dans un angle obscur de l’appartement, et c’était sur cette table que Lorenza avait placé ses bijoux, qu’elle avait offerts pour entrer aux Carmélites. Aux étincelles qu’ils jetaient dans l’ombre, le comte de Fœnix les avait reconnus.

— Si Votre Altesse Royale voulait bien rappeler ses souvenirs, insista le comte, et c’est une violence que je la prie de vouloir bien se faire, elle se rappellerait que Lorenza Feliciani était tout à l’heure dans cette chambre, et qu’elle a déposé sur cette table les bijoux qui y sont, et qu’après avoir eu l’honneur de conférer avec Votre Altesse, elle s’est retirée.