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commençait à m’emmener, se retourna au premier coup de sifflet que cet homme donna dans le manche de son fouet.

« Le bandit me laissa glisser jusqu’à terre.

« — Viens ici, dit l’inconnu.

« Et, comme le bandit hésitait, l’inconnu forma un angle avec son bras, posa deux doigts écartés sur sa poitrine. Et, comme si ce signe eut été l’ordre d’un maître tout-puissant, le bandit s’approcha de l’inconnu.

« Celui-ci se pencha à l’oreille du bandit, et tout bas prononça ce mot :

« — Mac.

« Il ne prononça que ce seul mot, j’en suis sûre, moi qui regardais comme on regarde le couteau qui va vous tuer, moi qui écoutais comme on écoute quand la parole qu’on attend doit être la mort ou la vie.

« — Benac, répondit le brigand.

« Puis, dompté comme un lion et rugissant comme lui, il revint à moi, détacha la corde qui me liait les poignets, et alla en faire autant à mon père et à ma mère.

« Alors, comme l’argent était déjà partagé, chacun vint à son tour déposer sa part sur une pierre. Pas un écu ne manqua aux cinq cents écus.

« Pendant ce temps, je me sentais revivre aux bras de mon père et de ma mère.

« — Maintenant, allez…, dit l'inconnu aux bandits.

« Les bandits obéirent et rentrèrent dans le bois jusqu’au dernier.

« — Lorenza Feliciani, dit alors l’étranger en me couvrant de son regard surhumain, continue ta route maintenant, tu es libre.

« Mon père et ma mère remercièrent l’étranger qui me connaissait, et que nous ne connaissions pas, nous. Puis ils remontèrent dans la voiture. Je les suivis comme à regret, car je ne sais quelle puissance étrange, irrésistible, m’attirait vers mon sauveur.

« Lui était resté immobile à la même place, comme pour continuer de nous protéger.