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ouvertes sur le monde, roulèrent pesamment et se refermèrent avec bruit entre le monde et la solitude.

Puis elle fit venir la trésorière.

— Pendant ces deux jours de désordre, demanda-t-elle, les pauvres ont-ils reçu les aumônes accoutumées ?

— Oui, Madame.

— Les malades ont-ils été visités comme de coutume ?

— Oui, Madame.

— A-t-on congédié les soldats un peu rafraîchis ?

— Tous ont reçu le pain et le vin que Madame avait fait préparer.

— Ainsi rien n’est en souffrance dans la maison ?

— Rien, Madame.

Madame Louise s’approcha de la fenêtre et aspira doucement la fraîcheur embaumée qui monte du jardin sur l’aile humide des heures voisines de la nuit.

La trésorière attendait respectueusement que l’auguste abbesse donnât un ordre ou un congé.

Madame Louise, Dieu seul sait à quoi songeait la pauvre recluse royale en ce moment, madame Louise effeuillait des roses à haute tige qui montaient jusqu’à sa fenêtre, et des jasmins qui tapissaient les murailles de la cour.

Tout à coup, un violent coup de pied de cheval ébranla la porte des communs et fit tressaillir la supérieure.

— Qui donc est resté à Saint-Denis de tous les seigneurs de la cour ? demanda Madame Louise.

— Son Éminence le cardinal de Rohan, Madame.

— Les chevaux sont-ils donc ici ?

— Non, Madame, ils sont au chapitre de l’abbaye, où il passera la nuit.

— Qu’est-ce donc que ce bruit, alors ?

— Madame, c’est le bruit que fait le cheval de l’étrangère.

— Quelle étrangère ? demanda Madame Louise, cherchant à rappeler ses souvenirs.

— Cette Italienne qui est venue hier soir demander l’hospitalité à Son Altesse.

— Ah ! c’est vrai. Où est-elle ?