— La chapelle vous est ouverte, ma sœur, dit la religieuse en montrant du doigt une petite porte latérale donnant dans l’église.
— Et je verrai madame la supérieure ? demanda l’étrangère.
— Demain.
— Demain matin ?
— Oh ! demain matin, ce sera encore chose impossible.
— Et pourquoi cela ?
— Parce que demain matin il y aura encore grande réception.
— Oh ! qui peut être reçu qui soit plus pressé ou plus malheureux que moi ?
— Madame la dauphine nous fait l’honneur de s’arrêter deux heures en passant demain. C’est une grande faveur pour notre couvent, une grande solennité pour nos pauvres sœurs ; de sorte que vous comprenez…
— Hélas !
— Madame l’abbesse désire que tout soit ici digne des hôtes royaux que nous recevons.
— Et en attendant, dit l’étrangère regardant avec un frisson visible autour d’elle, en attendant que je puisse voir l’auguste supérieure, je serai en sûreté ici ?
— Oui, ma sœur, sans doute. Notre maison est un asile même pour les coupables, à plus forte raison pour les…
— Fugitifs, dit l’étrangère ; bien. De sorte que personne n’entre ici, n’est-ce pas ?
— Sans ordre, non, personne.
— Oh ! et s’il obtenait cet ordre, mon Dieu, mon Dieu, dit l’étrangère, lui qui est si puissant, que sa puissance m’épouvante parfois.
— Qui, lui ? demanda la sœur.
— Personne, personne.
— Voilà une pauvre folle, murmura la religieuse.
— L’église, l’église ! répéta l’étrangère comme pour justifier l’opinion que l’on commençait à prendre d’elle.
— Venez, ma sœur, je vais vous y conduire.