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monsieur le baron de Taverney-Maison-Rouge, en son château, par Pierrefitte. »

« Sur chacune de ces lettres, je mis la lettre correspondante en caractères imprimés, et je vis que, sauf trois, toutes les lettres de l’alphabet étaient contenues dans ces deux lignes. Puis j’imitai les lettres tracées par mademoiselle Andrée. Au bout de huit jours, j’avais reproduit cette adresse dix mille fois peut-être, et je savais écrire. J’écris donc passablement et même plutôt bien que mal. Vous voyez, monsieur, que mes espérances ne sont pas exagérées, puisque je sais écrire, puisque j’ai lu tout ce qui m’est tombé sous la main, puisque j’ai essayé de réfléchir sur tout ce que j’ai lu. Pourquoi ne trouverais-je point un homme qui ait besoin de ma plume, un aveugle qui ait besoin de mes yeux, ou un muet qui ait besoin de ma langue ?

— Vous oubliez qu’alors vous auriez un maître, vous qui n’en voulez pas avoir. Un secrétaire ou un lecteur sont des domestiques de second ordre et pas autre chose.

— C’est vrai, murmura Gilbert en pâlissant ; mais n’importe, il faut que j’arrive. Je remuerai les pavés de Paris, je porterai de l’eau, s’il le faut, mais j’arriverai ou je mourrai en route, et alors mon but sera atteint de même.

— Allons, allons ! dit l’étranger, vous me paraissez être, en effet, plein de bonne volonté et de courage.

— Mais vous-même, voyons, dit Gilbert, vous-même, si bon pour moi, n’exercez-vous pas une profession quelconque ? Vous êtes vêtu comme un homme de finance.

Le vieillard sourit de son sourire doux et mélancolique.

— J’ai une profession, dit-il ; oui, c’est vrai, car tout homme doit en avoir une, mais elle est entièrement étrangère aux choses de finances. Un financier n’herboriserait point.

— Herborisez-vous par état ?

— Presque.

— Alors, vous êtes pauvre ?

— Oui.

— Ce sont les pauvres qui donnent, car la pauvreté les a