— J’en étais certain.
— Voyez-vous ! En vérité, duc, quel homme vous faites ! avoir su cela et ne pas m’en avoir prévenue, moi, votre amie, moi qui n’en savais rien.
— Comment cela, madame ? dit le duc, vous ne saviez point que vous dussiez venir ici ?
— Non. J’étais à peu près comme Ésope quand un magistrat l’arrêta dans la rue : « Où allez-vous ? lui demanda-t-il. — Je n’en sais rien, répondit le fabuliste. — Ah ! vraiment ? en ce cas, vous irez en prison. — Vous voyez bien que je ne savais pas où j’allais. » De même, duc, je pouvais croire aller à Versailles, mais je n’en étais pas assez sûre pour le dire. Voilà pourquoi vous m’eussiez rendu service en me venant voir… mais… vous viendrez à présent, n’est-ce pas ?
— Madame, dit Richelieu sans paraître ému le moins du monde de la raillerie, je ne comprends pas bien pourquoi vous n’étiez pas sûre de venir ici.
— Je vais vous le dire : parce que j’étais entourée de pièges.
Et elle regarda fixement le duc, qui soutint ce regard imperturbablement.
— De pièges ? Ah ! bon Dieu ! que me dites-vous là, comtesse ?
— D’abord, on m’a volé mon coiffeur.
— Oh ! oh ! votre coiffeur.
— Oui.
— Que ne m’avez-vous fait dire cela ; je vous eusse envoyé, mais parlons bas, je vous prie, ― je vous eusse envoyé une perle, un trésor, que madame d’Egmont a déterré, un artiste bien supérieur à tous les perruquiers, à tous les coiffeurs royaux, mon petit Léonard.
— Léonard ! s’écria madame Dubarry.
— Oui ; un petit jeune homme qui coiffe Septimanie et qu’elle cache à tous les yeux, comme Harpagon fait de sa cassette. Du reste, il ne faut pas vous plaindre, comtesse ; vous êtes coiffée à merveille et belle à ravir ; et, chose singulière, le dessin de ce tour ressemble au croquis que madame d’Egmont demanda