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de la croisée, et appuya ses mains à l’espagnolette ciselée et son front aux vitres fraîches.

Pendant ce temps, on entendait bruire, comme un cliquetis de feuillage avant la tempête, les conversations des courtisans. Tous les yeux allaient de la pendule au roi.

La pendule sonna la demie. Son timbre pur sembla pincer l’acier, et la vibration s’éteignit frémissante dans la vaste salle. M. de Maupeou s’approcha du roi.

— Beau temps, sire, dit-il timidement.

— Superbe, superbe… Comprenez-vous quelque chose à cela, M. de Maupeou ?

— À quoi, sire ?

— À ce retard… Pauvre comtesse.

— Il faut qu’elle soit malade, sire, dit le chancelier.

— Cela se conçoit que madame de Grammont soit malade, que madame de Guéménée soit malade, que madame d’Egmont soit malade aussi ; mais la comtesse malade, cela ne se conçoit pas !

— Sire, une forte émotion peut rendre malade, la joie de la comtesse était si grande !

— Ah ! c’est fini, dit Louis XV en secouant la tête, c’est fini ; maintenant, elle ne viendra plus.

Quoique le roi eût prononcé ces derniers mots à voix basse, il se faisait un silence tel, qu’ils furent entendus par presque tous les assistants.

Mais ils n’avaient pas encore eu le temps d’y répondre, même par la pensée, qu’un grand bruit de carrosses retentit sous la voûte.

Tous les fronts oscillèrent, tous les yeux s’interrogèrent mutuellement.

Le roi quitta la fenêtre et s’alla poster au milieu du salon pour voir l’enfilade de la galerie.

— J’ai bien peur que ce ne soit quelque fâcheuse nouvelle qui nous arrive, dit la maréchale à l’oreille du duc, qui dissimula un fin sourire.