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— Oh ! dit Chon épouvantée, nous manquerait-il aussi de parole ?

— Non, dit Jean, non, le voilà.

— Et le carrosse ? le carrosse ? dit la comtesse.

— Il sera resté à la porte, dit Jean. Le suisse va ouvrir ; il va ouvrir. Mais qu’a donc le carrossier ?

En effet, presque au même instant, maître Francian s’élança tout effaré dans le salon.

— Ah ! monsieur le vicomte, s’écria-t-il, le carrosse de madame était en route pour l’hôtel, quand, au détour de la rue Traversière, il a été arrêté par quatre hommes qui ont terrassé mon premier garçon qui vous l’amenait, et qui, mettant les chevaux au galop, ont disparu par la rue Saint-Nicaise.

— Quand je vous le disais, fit du Barry radieux sans se lever du fauteuil où il était assis en voyant entrer le carrossier, quand je vous le disais !…

— Mais c’est un attentat, cela ! cria Chon. Mais remuez-vous donc, mon frère.

— Me remuer, moi ; et pour quoi faire ?

— Mais pour nous trouver une voiture ; il n’y a ici que des chevaux éreintés et des carrosses sales. Jeanne ne peut aller à Versailles dans de pareilles brouettes.

— Bah ! dit du Barry, celui qui met un frein à la fureur des flots, qui donne la pâture aux oisillons, qui envoie un coiffeur comme monsieur, une robe comme celle-là, ne nous laissera pas en chemin faute d’un carrosse.

— Eh ! tenez, dit Chon, en voilà un qui roule.

— Et qui s’arrête même, reprit du Barry.

— Oui, mais il n’entre pas, dit la comtesse.

— Il n’entre pas ! c’est cela, dit Jean.

Puis sautant à la fenêtre, qu’il ouvrit :

— Courez, mordieu ! cria-t-il, courez ou vous arriverez trop tard. Alerte ! alerte ! que nous connaissions au moins notre bienfaiteur.

Les valets, les piqueurs, les grisons, se précipitèrent, mais il était déjà trop tard. Un carrosse doublé de satin blanc, et attelé de deux magnifiques chevaux bais, était devant la porte.