Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 2.djvu/104

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Je n’ai plus rien à vous en dire ; allez !

Et Jean se rangea pour laisser passer la voiture.

— Où m’attendez-vous ?

— Dans l’hôtellerie même ; je demanderai une bouteille de vin d’Espagne, et s’il vous faut main-forte, j’arriverai.

— Touche, cocher ! s’écria la comtesse.

— Rue Saint-Germain-des-Prés, au Coq chantant, ajouta le vicomte.

La voiture partit impétueusement dans les Champs-Élysées.

Un quart d’heure après, elle s’arrêtait près de la rue Abbatiale et du marché Sainte-Marguerite.

Là, madame du Barry mit pied à terre, car elle craignit que le roulement d’une voiture n’avertît la vieille rusée, aux aguets, sans doute, et que, se jetant derrière quelque rideau, elle n’aperçut la visiteuse assez à temps pour l’éviter.

En conséquence, seule avec son laquais qui marchait derrière elle, la comtesse gagna rapidement la rue Abbatiale, qui ne renfermait que trois maisons, dont l’hôtellerie sise au milieu.

Elle s’engouffra plutôt qu’elle n’entra dans le porche béant de l’auberge. Nul ne la vit entrer, mais au pied de l’escalier de bois, elle rencontra l’hôtesse.

— Madame de Béarn ? dit-elle.

— Madame de Béarn est bien malade, et ne peut recevoir.

— Malade ; justement, dit la comtesse, je viens demander de ses nouvelles.

Et, légère comme un oiseau, elle fut au haut de l’escalier en une seconde.

— Madame, madame ! cria l’hôtesse, on force votre porte !

— Qui donc ? demanda la vieille plaideuse du fond de sa chambre.

— Moi, fit la comtesse en se présentant soudain sur le seuil avec une physionomie parfaitement assortie à la circonstance, car elle souriait la politesse et grimaçait la condoléance.