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XXXV

MARRAINE ET FILLEULE.


La pauvre comtesse… conservons-lui l’épithète que le roi lui avait donnée, car elle la méritait certes bien en ce moment ; la pauvre comtesse, disons-nous, courait comme une âme en peine sur la route de Paris.

Chon, terrifiée comme elle de l’avant-dernier paragraphe de la lettre de Jean, cachait dans le boudoir de Luciennes sa douleur et son inquiétude, maudissant la fatale idée qu’elle avait eue de recueillir Gilbert sur le grand chemin.

Arrivée au pont d’Antin jeté sur l’égout qui aboutissait à la rivière et entourait Paris de la Seine à la Roquette, la comtesse trouva un carrosse qui l’attendait.

Dans ce carrosse était le vicomte Jean en compagnie d’un procureur, avec lequel il paraissait argumenter d’énergique façon.

Sitôt qu’il aperçut la comtesse, Jean laissa son procureur, sauta à terre en faisant signe au cocher de sa sœur d’arrêter court.

— Vite, comtesse, dit-il, vite, montez dans mon carrosse, et courez rue Saint-Germain-des-Prés.

— La vieille nous berne donc ? dit madame du Barry en changeant de voiture, tandis que le procureur, averti par un signe du vicomte, en faisait autant.

— Je le crois, comtesse, dit Jean, je le crois : c’est un prêté pour un rendu, ou plutôt un rendu pour un prêté.

— Mais que s’est-il donc passé ?

— En deux mots, voici. J’étais resté à Paris, moi, parce que je me défie toujours et que je n’ai pas tort, comme vous voyez. Neuf heures du soir venues, je me suis mis à