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croassent, calomnient, calculent, prêchent, crient. Qu’on les couronne, qu’on leur fonde des statues, qu’on leur bâtisse des temples, mais qu’on me laisse tranquille.

Sartines se leva, salua le roi, et sortit en murmurant :

— Heureusement qu’il y a sur nos monnaies : Domine, salvum fac regem [1].

Alors Louis XV, resté seul, prit une plume et écrivit au dauphin :

« Vous m’avez demandé d’activer l’arrivée de madame la dauphine : je veux vous faire ce plaisir.

« Je donne l’ordre de ne pas s’arrêter à Noyon ; en conséquence, mardi matin elle sera à Compiègne.

« Moi-même j’y serai à dix heures précises, c’est-à-dire un quart d’heure avant elle. »

— De cette façon, dit-il, je serai débarrassé de cette sotte affaire de la présentation, qui me tourmente plus que M. de Voltaire, que M. Rousseau, et que tous les philosophes venus et à venir. Ce sera une affaire alors entre la pauvre comtesse, le dauphin et la dauphine. Ma foi ! faisons dériver un peu les chagrins, les haines et les vengeances sur les esprits jeunes qui ont la force de lutter. Que les enfants apprennent à souffrir, cela forme la jeunesse.

Et, enchanté d’avoir tourné ainsi la difficulté, certain que nul ne pourrait lui reprocher d’avoir favorisé ou empêché la présentation qui occupait tout Paris, le roi remonta en voiture et partit pour Marly, où la cour l’attendait.

  1. « Seigneur, protège le roi »