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tous. Mon ami, conduisez-moi chez le baron de Taverney, je vous prie.

— Chez le baron de Taverney ? s’écria le jeune homme presque effrayé.

— Eh bien ! refusez-vous de me rendre ce service ?

— Non, monsieur ; mais c’est que…

— Après ?

— C’est qu’il ne vous recevra pas.

— Il ne recevra pas un gentilhomme égaré qui vient lui demander l’hospitalité ? C’est donc un ours que votre baron ?

— Dame ! fit le jeune homme avec une intonation qui voulait dire : « Cela y ressemble beaucoup, monsieur. »

— N’importe, dit le voyageur, je me risquerai.

— Je ne vous le conseille. pas, répondit Gilbert.

— Bah ! répondit le voyageur. Si ours que soit votre baron, il ne me mangera pas vivant.

— Non ; mais peut-être vous fermera-t-il sa porte.

— Alors je l’enfoncerai, et à moins que vous ne refusiez de me servir de guide…

— Je ne refuse pas, monsieur.

— Montrez-moi donc le chemin.

— Volontiers.

Le voyageur remonta alors dans le cabriolet, et y prit une petite lanterne.

Le jeune homme espéra un instant, la lanterne étant éteinte, que l’étranger rentrerait dans l’intérieur de la voiture, et qu’il pourrait voir, par l’entre-bâillement de la porte, ce que cet intérieur renfermait…

Mais il ne s’approcha pas même de la porte de la caisse.

Le voyageur mit la lanterne aux mains de Gilbert.

Celui-ci la tourna et la retourna en tous sens.

— Que voulez-vous que je fasse de cette lanterne, monsieur ? dit-il.

— Que vous éclairiez la route tandis que je conduirai les chevaux.

— Mais elle est éteinte, votre lanterne.