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a retenti à Philipsbourg, à Fontenoy, à Mahon, un Taverney-Maison-Rouge.

Le dauphin sembla respirer ce nom avec l’air de la salle pour le mieux conserver dans sa mémoire.

— Un Maison-Rouge ? dit Louis XV. Mais certainement que je connais cela. Et pourquoi s’est-il battu contre Jean que j’aime ? Parce que je l’aime, peut-être… Des jalousies absurdes, des commencements de mécontentement, des séditions partielles !

— Sire, Votre Majesté daignera-t-elle écouter ? dit M. de Choiseul.

Louis XV comprit qu’il n’avait plus d’autre moyen de se tirer d’affaire que de s’emporter.

— Je vous dis, monsieur, que je vois là un germe de conspiration contre ma tranquillité, une persécution organisée contre ma famille.

— Ah ! sire, dit M. de Choiseul, est-ce en défendant madame la dauphine, bru de Votre Majesté, qu’un brave jeune homme mérite ce reproche ?

Le dauphin se redressa et croisa les bras.

— Moi, dit-il, j’avoue que je suis reconnaissant à ce jeune homme d’avoir exposé sa vie pour une princesse qui dans quinze jours sera ma femme.

— Exposé sa vie, exposé sa vie ! balbutia le roi ; à quel propos ? Faut-il encore le savoir, à quel propos.

— À propos, reprit M. de Choiseul, de ce que M. le vicomte Jean Dubarry, qui voyageait fort vite, a imaginé de prendre les chevaux de madame la dauphine au relais qu’elle allait atteindre, et cela pour aller sans doute plus vite encore.

Le roi se mordit les lèvres et changea de couleur ; il entrevoyait comme un fantôme menaçant l’analogie qui l’inquiétait naguère.

— Il n’est pas possible ; je sais l’affaire : vous êtes mal renseigné, duc, murmura Louis XV pour gagner du temps.

— Non, sire, je ne suis pas mal renseigné, et ce que j’ai l’honneur de dire à Votre Majesté est la vérité pure. Oui, M. le vicomte Jean Dubarry a fait cette insulte à madame la