— Bon ! s’écria tout à coup le vicomte en se penchant à la portière et en regardant en arrière.
— Quoi ? demanda Chon.
— Le cheval arabe qui nous suit !
— Quel cheval arabe ?
— Celui que j’ai voulu acheter.
— Tiens, dit Chon, il est monté par une femme. Oh ! la magnifique créature !
— De qui parlez-vous ?… De la femme ou du cheval ?
— De la femme.
— Appelez-la donc, Chon ; elle aura peut-être moins peur de vous que de moi. Je donnerais mille pistoles du cheval.
— Et de la femme ? demanda Chon en riant.
— Je me ruinerais pour elle… Appelez-la donc !
— Madame ! cria Chon, Madame !
Mais la jeune femme aux grands yeux noirs, enveloppée dans un manteau blanc, le front ombragé d’un feutre gris à longues plumes, passa comme une flèche sur le revers du chemin, en criant :
— Avanti ! Djérid ! avanti !
— C’est une Italienne, dit le vicomte ; mordieu ! la belle femme ! si je ne souffrais pas tant, je sauterais à bas de la voiture et je courrais après elle.
— Je la connais, dit Gilbert.
— Ah çà ! mais ce petit paysan est donc l’almanach de la province ? Il connaît tout le monde !
— Comment s’appelle-t-elle ? demanda Chon.
— Elle s’appelle Lorenza.
— Et qu’est-elle ?
— C’est la femme du sorcier.
— De quel sorcier ?
— Du baron Joseph Balsamo.
Le frère et la sœur se regardèrent.
La sœur semblait dire :
— Ai-je bien fait de le garder ?
— Ma foi, oui, semblait répondre le frère.