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XV

MAGIE.


Balsamo s’inclina humblement, mais presque aussitôt, relevant sa tête pleine d’intelligence et d’expression, il attacha fixement, quoique avec respect, son regard clair sur la dauphine, et attendit silencieusement que celle-ci l’interrogeât.

— Si c’est vous dont vient de nous parler M. de Taverney, dit Marie-Antoinette, approchez-vous, monsieur, que nous voyions comment est fait un sorcier.

Balsamo fit encore un pas et s’inclina une seconde fois.

— Vous faites métier de prédire, monsieur, dit la dauphine, regardant Balsamo avec une curiosité plus grande peut-être qu’elle n’eût voulu la lui accorder, et en buvant son lait à petites gorgées.

— Je n’en fais pas métier, madame, dit Balsamo, mais je prédis.

— Nous avons été élevée dans une foi éclairée, dit la dauphine, et les seuls mystères auxquels nous ajoutions foi sont les mystères de la religion catholique.

— Ils sont vénérables sans doute, dit Balsamo avec un recueillement profond. Mais voilà M. le cardinal de Rohan, qui dira à Votre Altesse, tout prince de l’Église qu’il est, que ce ne sont point les seuls mystères qui méritent le respect.

Le cardinal tressaillit ; il n’avait dit son nom à personne, personne ne l’avait prononcé, et cependant l’étranger le connaissait.

Marie-Antoinette ne parut point remarquer cette circonstance, et continua :

— Vous avouerez du moins, monsieur, que ce sont les seuls que l’on ne controverse point.