— Cependant tout à l’heure, tu disais que je n’étais point au salon.
— C’est que ce n’est point au salon que j’ai vu mademoiselle.
— Où était-ce donc ?
— Dans le vestibule, près de l’escalier.
— Moi ! fit Andrée.
— Mademoiselle elle-même ; je connais bien mademoiselle, peut-être, fit Nicole avec un rire qui affectait la bonhomie.
— Je suis sûre, cependant, de n’avoir pas bougé du salon, reprit Andrée, en cherchant avec naïveté dans ses souvenirs.
— Et moi, dit Nicole, je suis sûre d’avoir vu mademoiselle dans le vestibule. J’ai même pensé, ajouta-t-elle en redoublant d’attention, que mademoiselle revenait de se promener au jardin. Il faisait beau hier dans la nuit, après l’orage. C’est agréable de se promener la nuit : l’air est plus frais, les fleurs sentent meilleur, n’est-ce pas, mademoiselle ?
— Mais tu sais bien que je n’oserais me promener la nuit, dit Andrée en souriant, je suis trop peureuse !
— On peut se promener avec quelqu’un, répliqua Nicole, et alors on n’a pas peur.
— Et avec qui veux-tu que je me promène ? dit Andrée qui était loin de voir un interrogatoire dans toutes les questions de sa chambrière.
Nicole ne jugea point à propos de pousser plus loin l’investigation. Ce sang-froid, qui lui paraissait le comble de la dissimulation, lui faisait peur.
Aussi jugea-t-elle prudent de donner un autre tour à la conversation.
— Mademoiselle a dit qu’elle souffrait, tout à l’heure ? reprit-elle.
— Oui, en effet, je souffre beaucoup, répondit Andrée : je suis abattue, fatiguée, et cela sans aucune raison. Je n’ai fait hier soir que ce que je fais tous les jours. Si j’allais être malade !
— Oh ! mademoiselle, dit Nicole, on a quelquefois des chagrins !