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commander à ceux qui l’aiment, Nicole put dormir après avoir concerté son petit plan de vengeance avec tous les démons qui lui faisaient l’honneur d’habiter son petit cœur de dix-sept ans.

Au reste, mademoiselle de Taverney lui paraissait aussi et même plus coupable que Gilbert. Une fille de noblesse, toute raide de préjugés, toute bouffie d’orgueil, qui, au couvent de Nancy, donnait de la troisième personne aux princesses, le vous aux duchesses, le toi aux marquises, et rien au-dessous ; une statue froide en apparence, mais sensible sous son écorce de marbre ; cette statue lui paraissait ridicule et mesquine lorsqu’elle se faisait femme pour un Pygmalion de village comme Gilbert.

Car, il faut le dire, Nicole, avec ce sens exquis dont la nature a doué les femmes, Nicole se sentait inférieure en esprit seulement à Gilbert, mais supérieure pour le reste. Sans cette suprématie de l’esprit, que son amant avait acquise sur elle par cinq ou six ans de lecture, elle dérogeait, elle, la chambrière d’un baron ruiné, en se donnant à un paysan.

Que faisait donc sa maîtresse, si sa maîtresse s’était réellement donnée à Gilbert ?

Nicole réfléchit que raconter ce qu’elle avait cru voir, mais ce qu’elle se figurait avoir vu en réalité, à M. de Taverney, ce serait une faute énorme : d’abord à cause du caractère de M. de Taverney, qui en rirait après avoir souffleté et chassé Gilbert ; puis à cause du caractère de Gilbert, qui trouverait la vengeance mesquine et méprisable.

Mais faire souffrir Gilbert dans Andrée, prendre un droit sur tous deux, les voir pâlir ou rougir sous son regard de chambrière, devenir maîtresse absolue et faire regretter peut-être à Gilbert le temps où la main qu’il baisait n’était dure qu’à la surface ; voilà ce qui flatta son imagination et caressa son orgueil, voilà ce qui lui parut réellement avantageux ; voilà ce à quoi elle s’arrêta.

Puis elle s’endormit.

Il faisait jour lorsqu’elle se réveilla, fraîche, légère, l’esprit dispos. Elle donna le temps ordinaire à sa toilette, c’est-à-dire