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la guérison, mais encore la réapparition prochaine comme un des personnages principaux de notre histoire.

Au moment de se séparer de son compagnon, lord Murrey se retourna vers lui :

— À propos, monsieur, lui dit-il, je donne dans trois jours un grand dîner aux autorités de l’île, j’espère que vous me ferez l’honneur d’être un de mes convives.

— Avec le plus grand plaisir, milord, répondit le jeune homme ; mais encore, avant que j’accepte, est-il convenable que de mon côté je dise à votre grâce qui je suis…

— Vous vous ferez annoncer en entrant chez moi, monsieur, répondit lord Murrey, et alors je saurai qui vous êtes ; en attendant je sais ce que vous valez, et c’est ce qu’il me faut.

Puis, saluant son compagnon de route de la main et du sourire, le nouveau gouverneur descendit dans la yole d’honneur avec le capitaine, et s’éloignant du brick sous l’impulsion rapide de dix vigoureux rameurs, il toucha bientôt la terre à la fontaine du Chien-de-Plomb.

En ce moment, les soldats, rangés en bataille, présentèrent les armes, les tambours battirent aux champs, le canon des forts et de la frégate retentirent à la fois, et pareils à un écho, ceux des autres bâtiments leur répondirent ; aussitôt des acclamations universelles de vive lord Murrey ! accueillirent joyeusement le nouveau gouverneur, qui, après avoir gracieusement salué ceux qui lui faisaient cette honorable réception, s’achemina, entouré des principales autorités de l’île, vers le palais.

Et cependant ces hommes qui faisaient fête au représentant de Sa Majesté Britannique, et qui applaudissaient à son arrivée, étaient bien les mêmes hommes qui autrefois avaient pleuré le départ des Français ; — mais aussi, c’est que quatorze ans s’étaient écoulés depuis cette époque ; la génération ancienne avait en partie disparu, et la génération nouvelle ne gardait le souvenir des choses passées que par ostentation et comme on garde une vieille charte de famille. — Quatorze ans s’étaient écoulés, avons-nous déjà dit, et c’est plus qu’il n’en faut pour oublier la mort de son meil-