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seule consolation que pût lui donner encore la promesse d’une mort douce et facile.

La journée s’écoula pour Georges comme s’étaient écoulées les journées précédentes, seulement il écrivit à son père et à son frère. Un instant il prit la plume pour écrire à Sara ; mais quel que fût le motif qui le retînt, il s’arrêta, repoussa le papier et laissa tomber sa tête dans ses mains ; il resta longtemps ainsi, et quelqu’un qui lui eût vu relever le front, ce qu’il fit avec le mouvement hautain et dédaigneux qui lui était habituel, se fût aperçu avec peine que ses yeux étaient légèrement rougis, et qu’une larme mal essuyée tremblait au bout de ses longs cils noirs.

C’est que depuis le jour où il avait, chez le gouverneur, refusé d’épouser la belle créole, non seulement il ne l’avait pas revue, mais encore il n’avait pas entendu reparler d’elle.

Cependant il ne pouvait croire qu’elle l’eût oublié !

La nuit vint, Georges se coucha à son heure habituelle, et s’endormit du même sommeil que les autres nuits : le matin en se levant, il fit appeler le directeur de la prison.

— Monsieur, lui dit-il, j’aurais une grâce à vous demander.

— Laquelle ? dit le directeur.

— Je voudrais causer un instant avec le bourreau

— Il me faut l’autorisation du gouverneur.

— Oh ! dit Georges en souriant, faites-la lui demander de ma part ; lord Murrey est un gentleman, et il ne refusera pas cette grâce à un ancien ami.

Le directeur sortit en promettant de faire la démarche demandée.

Derrière le directeur entra un prêtre.

Georges avait ces idées religieuses qu’ont de nos jours à peu près tous les hommes de notre âge, c’est-à-dire que tout en négligeant les pratiques extérieures de la religion, il était au fond du cœur profondément impressionnable aux choses saintes : ainsi une église sombre, un cimetière isolé, un cercueil qui passait, étaient pour son âme des impressions certes plus graves que ne l’eût été un de ces événements qui bouleversent souvent l’esprit du vulgaire des hommes.

Le prêtre était un de ces vieillards vénérables qui ne s’oc-