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avait fait chasse ; les uns, à coups de bâton, avaient assommé des tanrecs, dont, en général, les nègres sont fort friands ; d’autres avaient tué des singes ou des coqs des bois ; enfin, Laïza avait blessé un cerf, à la poursuite duquel quatre hommes s’étaient mis, et qu’ils avaient rapporté au bout d’une heure : il y avait donc des provisions pour toute la troupe.

Laïza profita de cette halte pour panser le blessé ; de temps en temps il s’était écarté du brancard pour aller cueillir quelque herbe ou quelque plante dont lui seul connaissait la propriété. Arrivé au lieu du repos, il réunit sa récolte, plaça la première collection qu’il venait de rassembler dans un creux de rocher ; puis, avec une pierre arrondie, il broya les simples qu’il venait de cueillir à peu près comme il eût fait dans un mortier. Cette opération terminée, il en exprima le suc, y trempa un linge, et, levant l’appareil mis la veille, il plaça les compresses nouvellement imbibées sur la double plaie ; car, par bonheur encore, la balle n’était point restée dans la blessure, et, entrée un peu au-dessous de la dernière côte gauche, elle était sortie un peu au-dessus de la hanche.

Pierre Munier suivit cette opération avec une anxiété profonde. La blessure était grave, mais n’était point mortelle ; il y avait plus : il était visible, à l’inspection des chairs, qu’en supposant qu’aucun organe important n’eût été lésé à l’intérieur, la guérison serait plus rapide peut-être qu’elle ne l’eût été entre les mains d’un médecin des villes. Le pauvre père n’en passa pas moins par toutes les angoisses qu’une pareille vue devait éveiller en lui, tandis que Georges, au contraire, malgré les douleurs qu’un pareil pansement devait lui faire éprouver, ne fronça pas même le sourcil, et réprima jusqu’au moindre frissonnement de la main que son père tenait entre les siennes.

Le pansement fini et le repas achevé, on se mit en route. On approchait des grands bois, mais encore fallait-il les atteindre ; la petite troupe, retardée par le transport du blessé, transport que les accidents du terrain rendaient fort difficile, ne s’avançait que lentement, et, depuis le départ de l’habitation, avait laissé une trace facile à suivre.

On marcha une heure encore à peu près en suivant les