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sant presque de l’influence que me donne ma position, j’ai obtenu du père qu’il oublierait sa vieille haine contre votre père, du fils qu’il oublierait sa jeune haine contre vous, de tous deux qu’ils consentiraient au mariage de mademoiselle de Malmédie.

— Sara est libre, milord, interrompit vivement Georges, et, pour devenir ma femme, Dieu merci, elle n’a besoin du consentement de personne.

— Oui, j’en conviens, reprit le gouverneur ; mais quelle différence aux yeux de tous, je vous le demande, d’enlever furtivement une jeune fille de la maison de son tuteur, ou de la recevoir publiquement de la main de sa famille ! Consultez votre orgueil, monsieur Munier, et voyez si je ne lui avais pas ménagé une suprême satisfaction, un triomphe auquel lui-même ne s’attendait pas.

— C’est vrai, répondit Georges. Malheureusement ce consentement arrive trop tard.

— Trop tard ! et pourquoi cela, trop tard ? reprit le gouverneur.

— Dispensez-moi de vous répondre sur ce point, milord. C’est mon secret.

— Votre secret, pauvre jeune homme. Eh bien ! voulez-vous que je vous le dise, moi, ce secret que vous ne voulez pas me dire ?

Georges regarda le gouverneur avec un sourire d’incrédulité.

— Votre secret ! continua le gouverneur, voilà un secret bien sûr et bien gardé, qu’un secret confié à dix mille personnes.

Georges continua de regarder le gouverneur, mais cette fois sans sourire.

— Écoutez-moi, reprit le gouverneur, vous vouliez vous perdre, j’ai voulu vous sauver. J’ai été trouver l’oncle de Sara, je l’ai pris à part et je lui ai dit : Vous avez mal apprécié monsieur Georges Munier, vous l’avez repoussé insolemment, vous l’avez forcé de rompre ouvertement avec nous, et vous avez eu tort, car monsieur Georges Munier était un homme distingué, au cœur élevé, à l’âme grande ; il y avait quelque chose à faire de cette organisation-là, et la preuve, c’est que