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bitation. Or, il était impossible que l’apparition arrivât plus à point. Depuis le jour des courses, Georges n’avait pas même aperçu Sara.

Si maître que fût le jeune homme de lui-même, il ne put s’empêcher d’ouvrir la fenêtre et de faire signe à Miko-Miko de doubler le pas, ce que l’honnête Chinois fit aussitôt. Laïza voulait se retirer, mais Georges le retint en lui disant qu’il avait encore quelque chose à lui dire.

En effet, comme l’avait prévu Georges, Miko-Miko n’était pas venu à Moka de son propre mouvement ; à peine entré, il tira un charmant billet plié de la façon la plus aristocratique, c’est-à-dire étroit et long, où une fine écriture de femme avait écrit pour toute adresse son prénom. À la seule vue de ce billet, le cœur battit violemment à Georges. Il le prit des mains du messager, et pour cacher son émotion, pauvre philosophe qui n’osait pas être homme, il alla le lire dans un angle de la fenêtre.

La lettre était effectivement de Sara, et voici ce qu’elle disait :

« Mon ami,

« Trouvez-vous aujourd’hui vers les deux heures de l’après-midi chez lord Williams Murrey, et vous y apprendrez des choses que je n’ose vous dire tant elles me rendent heureuse ; puis en sortant de chez lui, venez me voir, je vous attendrai dans notre pavillon.

« Votre Sara. »

Georges relut deux fois cette lettre : il ne comprenait rien à ce double rendez-vous ; comment lord Murrey pouvait-il lui dire des choses qui rendaient Sara heureuse, et comment lui, en sortant de chez lord Murrey, c’est-à-dire vers trois heures de l’après-midi, en plein jour, à la vue de tous, pouvait-il se présenter chez monsieur de Malmédie.

Miko-Miko seul pouvait lui donner l’explication de tout cela ; il appela donc le Chinois et commença de l’interroger ; mais le digne négociant ne savait rien autre chose, sinon que mademoiselle Sara l’avait envoyé chercher par Bijou qu’il n’avait pas reconnu d’abord, attendu que, dans sa lutte avec