Page:Dumas - Georges, 1848.djvu/238

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pourra le mettre à mort à l’instant même, de la mort qui lui conviendra, prompte ou lente, douce ou cruelle. Vous soumettez-vous d’avance à son jugement ? Quant à moi, je m’y soumets le premier.

— Oui, oui, crièrent toutes les voix : s’il y a un traître, que le traître soit mis à mort, à mort le traître !

— C’est bien. Et maintenant, combien êtes-vous ?

— Nous sommes dix mille, dit Laïza.

— Mes trois cents serviteurs sont chargés de vous remettre à chacun quatre piastres, car il faut que pour jeudi soir chacun ait une arme quelconque. À jeudi.

Et Georges, saluant de la main, repartit comme il était venu, tandis que les trois cents nègres ouvraient chacun un sac rempli d’or, et donnaient à chaque homme les quatre piastres promises.

Cette magnificence royale coûtait, il est vrai, à Georges Munier deux cent mille francs. Mais qu’était-ce que cette somme pour un homme riche à millions, et qui eût sacrifié toute sa fortune à l’accomplissement du projet arrêté depuis si longtemps dans sa volonté.

Enfin ce projet allait s’accomplir ; le gant était jeté.


XX.

LE RENDEZ-VOUS.


Georges rentra chez lui beaucoup plus calme et beaucoup plus tranquille qu’on n’aurait pu le croire. C’était un de ces hommes que l’inaction tue et que la lutte grandit : il se contenta de préparer ses armes, en cas d’attaque imprévue, tout en se réservant une retraite vers les grands bois, qu’il avait parcourus dans sa jeunesse, et dont le murmure et l’immensité, mêlés au murmure et à l’immensité de la mer, avaient fait de lui l’enfant rêveur que nous avons vu.

Mais celui sur qui retombait réellement le poids de tous