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RICHARD.

Ventre à terre jusqu’à Douvres.

(Il entre dans le cabinet.)
JENNY, entrant.

Adieu donc, Richard… Où est-il ?

TOMPSON.

Sorti.

JENNY.

Sans me voir, sans me dire adieu !… Oh ! cela me manquait !… Venez, monsieur, je suis prête.

(Richard sort lentement, les suit par derrière, regarde à la fenêtre de l’antichambre ; on entend le roulement d’une voiture, le bruit du fouet du postillon.)
RICHARD, s’essuyant le front.

Enfin !…

LE DOMESTIQUE

Accompagnerai-je monsieur ?

RICHARD, rentrant.

Oui, James, vous viendrez avec moi.


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SEPTIÈME TABLEAU.
Une grande route.

Scène XI.

MAWBRAY, derrière un des arbres qui bordent le chemin.

C’est un rapt, un rapt infâme, contre lequel je ne puis invoquer les lois, car pour les invoquer il faudrait me faire connaître ; d’ailleurs contre qui les invoquerais-je ? contre mon fils ! Oh ! Richard ! si tu as un démon, tu auras aussi ton bon génie. C’est un homme ébloui qui se perd, qui se vend ! malheur ! tant d’espérances reposaient sur ta tête !… c’est pour cela, c’est pour être libre qu’il m’a fait consigner à la porte de son hôtel… Oh ! merci, Richard, car j’ai vu sortir ton fidèle Tompson, j’ai vu revenir les chevaux de poste, j’ai su quelle route ils devaient prendre… Tout mon espoir et celui de Jenny est donc maintenant en moi, en moi, être isolé, autour duquel tous les liens de la société sont brisés et qui ne m’appuie sur personne… Allons, vieillard, retrouve ton cœur et ta main de jeune homme, car tous deux ne t’ont jamais été plus nécessaires. Est-ce leur voiture ?… non… la nuit commence à descendre : tant mieux, cette route sera plus solitaire… Ah ! Tompson ! intrigant subalterne, demi-fripon, moitié d’assassin… Tompson, Tompson, tu as à régler avec moi le compte de l’honneur de Richard et du bonheur de Jenny !… Tompson, malheur à toi !… Un bruit de chevaux… — (Se penchant à terre pour écouter.) Eh bien ! soit, cachons-nous comme un brigand derrière cet arbre ; la partie est engagée… Jenny, il me faut Jenny, il me la faut par tous les moyens possibles… Ils approchent… Allons, que Dieu regarde et juge. — (Se jetant à la tête des chevaux.) Postillon, arrêtez…

LE POSTILLON.

Haoh !…


Scène XII.

MAWBRAY, TOMPSON, JENNY.
MAWBRAY.

Ne craignez rien, je ne suis pas un assassin… Ne conduisez-vous pas deux personnes ?…

TOMPSON, sortant la tête de la portière.

Qu’y a-t-il, postillon ?

MAWBRAY.

Ce sont eux !

TOMPSON.

Mawbray ! Postillon, au galop.

MAWBRAY, le menaçant.

Si tu fais un pas, tu es mort ! descends… — (Le postillon se jette à bas de son cheval.) Jenny, êtes-vous là ?

TOMPSON, dans la voiture.

Silence, madame.

JENNY, d’une voix étouffée.

Mawbray ! Mawbray !…

MAWBRAY, ouvrant la portière.

Ah !

TOMPSON, se jetant dehors et repoussant Mawbray.

Que voulez-vous ?