moi je ne me trompe point, vous êtes le secrétaire du conseil. — (Richard semble prêt à nier.) Je désire que vous soyez le secrétaire du conseil.
Je le suis, milord.
Très-bien, vous m’avez compris… Monsieur le secrétaire, voulez-vous vous asseoir à cette table ?
J’attends les ordres de milord.
Parmi ces papiers en voici qui exigent un prompt examen… Voulez-vous bien m’en donner connaissance ?
« Titres de propriété du comté de Carlston et de ses dépendances dans le Devonshire, concédés à tout jamais à… » Le nom est en blanc.
C’est une omission… Voulez-vous écrire sous ma dictée ?
Mais…
Richard Darlington.
Je ne puis écrire…
Comment, monsieur le secrétaire, vous refusez d’écrire un nom que je ne prononce qu’avec le respect dû au talent ?
Cette touchante bonté…
Vous écrivez, n’est-ce pas ?… Ayez la complaisance de continuer.
« Lettres de noblesse conférant à perpétuité le titre de comte à… »
Les mêmes noms, je vous prie.
Vous êtes obéi.
Après, de grâce.
« Contrat de mariage entre miss Lucy Wilmor, fille de feu lord Wilmor, pair du royaume, petite-fille du marquis Da Sylva, et le noble comte de Carlston… »
Nous connaissons les parties contractantes, mais les conditions, je vous prie.
« La jeune miss apporte à son mari cent mille livres sterling en biens-fonds et en actions de banque.
» Le marquis Da Sylva, par substitution de sa fille Caroline Wilmor, reconnaît sa petite-fille pour sa seule et unique héritière.
» Le titre de pair, éteint à la mort de lord Wilmor, revit pour l’époux de sa fille et ses descendants mâles à perpétuité. »
Tout cela est parfait… Ne trouvez-vous pas que le nom de Georges scellé d’un don royal ferait bien sur ce contrat ?
Tant de faveurs sur un seul homme, en si peu d’heures !
Ah ! vous êtes envieux !… puisque vous résistez si bien à l’entraînement, vous devez être un homme de bon conseil… Le ministère perd de sa popularité, n’est-ce pas ? le roi reculerait à le recomposer avec l’élément démocratique. Il parlait dernièrement de choisir le président du conseil parmi les jeunes pairs ; croyez-vous au succès d’une semblable combinaison ?
Un dévouement sans bornes…
Il reste un dernier papier.
Blanc.
Vous ne comprenez pas ?
Si fait ! — (Il signe.) À vous ce papier, milord ; à moi ceux-ci.
Je veux dire au roi que nous avons fait connaissance.
Scène XXI.
Ah ! c’est un rêve !… une folie !… une apparition !… mais… mais ces papiers ? Ah ! non, non, tout cela est réel. Oh ! je ne puis respirer la tête me tourne… Richard ! Richard ! dans tes songes les plus brillants avais-tu jamais osé prévoir… ?