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L’HUISSIER, annonçant.

Monsieur le premier lord de la trésorerie.

LE MINISTRE DE LA GUERRE.

Nous allons tout savoir, car voici notre président.

LE LORD DE LA TRÉSORERIE, à l’huissier.

Laissez-nous seuls.

LE MINISTRE DE LA GUERRE., au lord de la trésorerie.

Vous sortez de chez le roi ?

LE LORD DE LA TRÉSORERIE.

Oui, messieurs.

LE MINISTRE DE LA GUERRE.

Eh bien ?…

LE LORD DE LA TRÉSORERIE.

Sa Majesté est plus que jamais affligée de l’opposition qui se manifeste dans la chambre des Communes, et elle met entre nos mains tous les moyens qui sont en son pouvoir pour que nous la combattions.

LE MINISTRE DE LA GUERRE.

Dans une telle circonstance, il faut bien l’avouer, il ne nous reste qu’un seul parti.

LE MINISTRE DE L’INTÉRIEUR.

Lequel ?

LE MINISTRE DE LA GUERRE.

Quoi qu’il puisse nous en coûter, disons-le, il faut amener à nous sir Richard.

LE PRÉSIDENT.

C’est pour vous parler de lui, messieurs, que je vous ai réunis. Une première démarche a été faite, mais avant d’aller plus loin, j’ai dû me rappeler que nous sommes tous solidaires et vous consulter sur ce qu’il me reste à faire.

LE MINISTRE DE LA GUERRE.

Nous écoutons Votre Grâce.

LE PRÉSIDENT.

Des ouvertures ont été faites par le marquis Da Sylva à son secrétaire Tompson ; elles ont été reçues de manière à nous laisser beaucoup espérer : j’ai cru alors que de semblables négociations voulaient être pressées, et j’ai fait demander à sir Richard une entrevue secrète pour ce soir.

LE MINISTRE DE L’INTÉRIEUR.

Nous présumons bien quel en doit être l’objet : mais jusqu’à quel point pouvons-nous nous engager ?


LE PRÉSIDENT.

Messieurs, toutes mes promesses seront réalisées, j’en ai l’assurance et je suis autorisé à promettre beaucoup.

LE MINISTRE DE LA GUERRE.

Mais enfin s’il résistait ?

LE PRÉSIDENT.

Dans ce cas, il resterait encore un moyen à essayer, une tentative hasardeuse, inusitée, un tête-à-tête dangereux.

UN HUISSIER, entrant.

Un membre de la chambre des Communes demande à être introduit près de Leurs Excellences.

LE MINISTRE DE LA GUERRE.

Son nom ?

L’HUISSIER.

C’est l’honorable sir Richard.

LES MINISTRES.

Sir Richard !

LE PRÉSIDENT.

Déjà ! en plein conseil ! ce n’étaient pas nos conventions. — (À l’huissier.) Faites entrer. — (Aux ministres.) Nous ne pouvons nous dispenser de le recevoir.


Scène XVII.

Les précédents ; RICHARD.
RICHARD.

Salut à Leurs Excellences.

LE MINISTRE DES FINANCES.

Soyez le bien venu, sir Richard.

RICHARD.

Sa Grâce dit-elle ce qu’elle pense ?

LE MINISTRE DES FINANCES.

Jamais entrevue ne fut plus désirée.

RICHARD.

Vous y comptiez ?

LE MINISTRE DES FINANCES.

Nous l’espérions.

RICHARD.

Cet espoir n’est pas un éloge de la modestie que vous me supposiez.

LE MINISTRE DES FINANCES.

Et pourquoi cela ?

RICHARD.

C’est que je doute encore moi-même que tout ceci ne soit pas un songe. Moi, avocat obscur d’une petite ville, simple membre de la chambre des Communes, en face des hommes que leur nom, que leur position politique place autour des marches du trône de la vieille Angleterre ; c’est par trop hardi à moi, Richard Darlington, député du peuple.

LE MINISTRE DES FINANCES.

Monsieur, le peuple s’est écrit avec le sang des révolutions des lettres de noblesse qui lui permettent, comme à la vieille aristocratie, de traiter d’égal à égal avec la royauté.

RICHARD.

Monsieur le ministre, ses droits sont plus anciens que vous ne le pensez ; son blason sanglant remonte à Cromwell, et il a pris pour armes parlantes une couronne à terre, près d’une hache et d’un billot debout.