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RICHARD.

Rien.

TOMPSON.

Le roi protège trop l’aristocratie pour choisir un nouveau ministère dans l’opposition de la chambre des Communes.

RICHARD.

Je le sais.

TOMPSON.

Vous n’avez donc aucune chance ?

RICHARD.

Aucune.

TOMPSON.

Tandis que si le ministère reste…

RICHARD.

Eh bien !

TOMPSON.

Je vous l’ai dit, il est à vos pieds.

RICHARD.

Je ne le relèverai pas.

TOMPSON.

Vous avez tort.

RICHARD.

Et mon mandat !

TOMPSON.

Et votre ambition !

RICHARD.

Je suis arrivé à mon but.

TOMPSON.

Je croyais que vous n’en étiez qu’à moitié chemin.

RICHARD.

J’ai réfléchi.

TOMPSON.

Et votre position…

RICHARD.

Me paraît glorieuse ; je me la suis faite par mon talent.

TOMPSON.

Et vous la soutenez par votre fortune. Deux années de séjour à Londres avaient déjà épuisé vos deux mille livres sterling ; la mort du docteur, puis celle de sa femme, sont venues soutenir d’un raisonnable héritage le luxe que vous êtes forcé de déployer. Aujourd’hui votre plus beau diamant est la franchise des lettres que vous vendez à votre banquier ; la retraite où vit mistress Richard vous permet, je le sais, de réunir toutes vos ressources sur un seul point, mais elles ne sont pas inépuisables. Vous avez encore trois ans à siéger sur les bancs de la chambre, et elles ne vous conduiront pas jusque-là. Que vous restera-t-il alors ?

RICHARD.

Une pauvreté honorable.

TOMPSON.

Qui vous ôtera jusqu’à la chance d’être réélu.

RICHARD.

Le peuple n’oubliera pas son défenseur.

TOMPSON.

Votre triomphe vous enivre, sir Richard ; le peuple, il n’est puissant que pour renverser : c’est un élément ; sa colère peut effrayer un ministre, je le conçois ; sa faveur ne peut rassurer un ambitieux ; l’or, les places, sont-ils entre ses mains ? peut-il en disposer sans l’approbation d’un ministre ? Le peuple ! mourez pour le défendre, et il n’aura pas même le droit de vous donner une pierre à Westminster. Parlons franc, sir Richard.

RICHARD.

Bref, qui est venu près de vous ?

TOMPSON.

Da Sylva.

RICHARD.

Ce banquier portugais ?

TOMPSON.

Oui.

RICHARD.

Quel intérêt prend-il au ministère ?

TOMPSON.

Il a avancé des sommes considérables…

RICHARD.

Qu’il craint de perdre…

TOMPSON.

Si le ministère tombe.

RICHARD.

Et il vient en son nom…

TOMPSON.

Proposer un traité de paix.

RICHARD.

Ses conditions ?

TOMPSON.

Vous les entendrez de sa proche bouche.

RICHARD.

Vous avez pu lui laisser concevoir l’espérance que je consentirais même à un pourparler ? Niais !

TOMPSON.

Je mériterais ce nom, sir Richard, si j’avais fait ce que vous dites.

RICHARD.

Comment avez-vous donc arrangé cela ?

TOMPSON.

De manière à ce que rien ne puisse vous compromettre.

RICHARD.

Voyons.

TOMPSON.

C’est à moi que les propositions vont être faites.

RICHARD.

Où ?

TOMPSON.

Ici.