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absinthe.

leurs robes tigrées, et vides de leurs cœurs de bois. Ce sera dans une mesure d’eau purifiée, par le moyen que tu l’auras fait bouillir d’avance avec quelques feuilles d’oseille. Tu n’omettras pas d’y joindre une poignée d’orge, avec sept grains de maïs, et trois pincées de fine graine de lin d’Europe. Après une demi-heure de cuisson, tu la retireras de son marc, et tu la feras boire en y délayant du miel clarifié. Peu de miel, et bonne espérance avec pleine confiance ! »

C’est cet arbrisseau qui fournit les graines rouges marquées d’un point noir, que vendent les marchands de curiosités, et avec lesquelles on fait des colliers et des chapelets aux enfants.


ABRUS. — Petit arbre qui croit en Amérique et dans l’Inde. Sa racine, qui fait une partie de la nourriture des Indous, a une saveur sucrée ; elle est nutritive et adoucissante.

Elle se mange crue.


ABSINTHE. — Plante vivace, dont les feuilles sont fort amères ; on la trouve dans toute l’Europe ; dans le Nord, on en fait un vin appelé vermouth.

Il y a deux sortes d’absinthe : la grande absinthe, appelée absinthe romaine, la petite, appelée absinthe pontique ou petite absinthe ; on connaît aussi cette plante sous le nom d’absinthe marine, on mange avec plaisir celle qui vient sur le bord de la mer et sur les montagnes, et c’est à cette dernière surtout, que la chair des animaux doit ce goût si estimé des gourmands connu sous le nom de pré-salé.

Quoique tous les dispensaires vantent l’absinthe comme fortifiant l’estomac et aidant la digestion, quoique l’école de Salerne recommande l’absinthe comme un préservatif du mal de mer, il est impossible de ne pas déplorer les ravages que l’absinthe a faits depuis quarante ans, parmi nos soldats, et parmi nos poëtes, et il n’y a pas un chirurgien de régiment qui ne nous dise que l’absinthe a tué plus de Français en Afrique que la flitta, le yatagan, ou le fusil des Arabes.

L’absinthe, parmi nos poëtes bohèmes, a reçu le nom de muse verte ; plusieurs qui n’étaient pas des derniers, par malheur, sont morts des embrassements empoisonnés de cette muse. Hegésippe Moreau, Amédée Roland, Alfred de Musset, notre