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HISTOIRE DE MES BÊTES.

Je n’avais pas achevé ces mots, qu’il se fit dans l’intérieur des communs, un vacarme à faire croire que toute une meute était en train de faire curée, des cris de rage, des abois de douleur indiquaient un combat à outrance.

— Eh mon Dieu ! Michel, dis-je, entendez-vous ?

— Oui, j’entends bien, répondit-il ; mais ce sont les chiens de M. Pigeory.

— Michel, c’est Catinat et Pritchard qui se dévorent tout simplement.

— Monsieur, ça ne se peut pas, je les ai séparés.

— Eh bien, Michel, ils se sont réunis.

— Ce n’est pas l’embarras, les guerdins en sont bien capables ; avec ça que cette canaille de Pritchard ouvrait la porte de l’écurie comme un serrurier,

— Eh bien, comme Pritchard est un chien plein décourage, il aura ouvert la porte de l’écurie pour aller défier Catinat. Et, tenez, ma foi, j’ai bien peur qu’il n’y en ait un des deux d’étranglé.

Michel se précipita dans l’allée qui conduisait à l’écurie, et, bientôt après l’avoir perdu de vue, j’entendis des lamentations indiquant qu’un grand malheur était arrivé.

Au bout d’un instant, je vis reparaître Michel, sanglotant et tenant Pritchard, entre ses bras.

— Tenez, monsieur, me dit-il, il n’y a plus de Pritchard ! voilà l’état où il l’a mis, votre beau chien de M. Devisme ! Ce n’est pas Catinat qu’il faut l’appeler, c’est Catilina.

Je m’élançai vers Michel ; malgré les rages où il m’avait fait mettre quelquefois, j’avais une grande amitié pour Pritchard.