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HISTOIRE DE MES BÊTES.

d’elle, la suivit à la fois de l’œil et de la course, et, quand, au bout de son vol, elle tomba lourdement, ce fut presque dans sa gueule.

Il n’y avait pas besoin de pousser la chasse plus loin. Je savais ce que je voulais savoir : le terrain était giboyeux. Je revins à Paris. Je courus chez mon ami d’Orsay, je lui fis part de ma bonne fortune.

Je le trouvai occupé à faire un buste de Lamartine.

D’Orsay, le comte d’Orsay, frère de la belle madame de Grammont, est un de ces hommes dont j’aime à retrouver de temps en temps le nom sous ma plume. J’ai toujours quelque chose à en dire de nouveau ; et non-seulement de nouveau, mais encore de bon.

D’Orsay faisait donc le buste de Lamartine ; car, en même temps qu’il était un grand seigneur, d’Orsay était un grand artiste : il dessinait et sculptait avec une élégance parfaite. Peut-être la science avait-elle quelque chose à reprendre à ses dessins et à sa sculpture ; mais nul n’avait comme lui le sentiment de l’idéal.

Le seul portrait qui nous soit resté de Byron, celui que le poëte a exigé que l’on mît à la tête de ses œuvres, était de d’Orsay.

Ce goût extrême l’accompagnait dans tout ; médiocrement riche et forcé, vers la fin de sa vie, de regarder à ses dépenses après avoir été l’homme le plus fashionable de France et d’Angleterre, il avait loué je ne me rappelle plus dans quelle rue, pour huit cents francs, une espèce de grenier dont il avait fait l’atelier le plus élégant de tout Paris.

Pendant dix ans, il avait donné le ton à la France et à l’Angle-