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HISTOIRE DE MES BÊTES.

de la rivière, il me restait à lui mettre une pierre au cou et à le jeter à l’eau.

C’est ce que Caton eût probablement fait. Mais, que voulez-vous ! je ne suis pas un vieux Romain, moi ; et le Plutarque qui racontera ma vie ne manquera pas de dire, en style moderne, que j’étais un panier percé, en oubliant d’ajouter, bien entendu, que ce n’était pas toujours moi qui faisais les trous au panier.

Vous me direz bien encore que rien n’était plus facile que de remplacer Pritchard ; que je n’avais qu’à descendre la rampe de la montagne, traverser le pont du Pecq, gagner la forêt du Vésinet, entrer chez Vatrin et lui acheter un beau et bon chien d’arrêt braque, comme nous avons l’habitude d’en avoir, nous autres chasseurs français, au lieu d’un pointer anglais.

Mais je vous répondrai — car j’ai réponse à tout — que, tout en n’étant pas assez pauvre pour noyer Pritchard, je n’étais plus assez riche pour acheter un autre chien.

Il va sans dire qu’au bruit de journaux intitulés le Père Duchesne, la Guillotine, la République rouge, la littérature purement historique ou pittoresque était tombée aussi bas qu’elle pouvait tomber.

Or, au lieu de faire de la littérature, j’avais fondé un journal appelé le Mois, et collaboré à un autre journal intitulé la Liberté.

Tout cela rapportait trente et un francs par jour. Puis restait le Théâtre-Historique ; mais celui-là en coûtait cent, deux cents et quelquefois cinq cents.

Il est vrai que j’avais une chance : c’est que, faisant, dans mes deux journaux, une guerre acharnée à MM. Barbès, Blanqui et