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HISTOIRE DE MES BÊTES.

j’eusse donc pu, si tel eût été mon désir, avoir tous les matins à déjeuner une gibelotte de lapin.

Mais, sur ces entrefaites, il se passait à Paris des choses qui rendaient mon séjour à la campagne impossible.

On ouvrait le Théâtre-Historique. Maintenant, comme ceci n’est ni un livre, ni un roman, ni une leçon de littérature, mais tout simplement un bavardage entre vous et moi, chers lecteurs, laissez-moi vous raconter la légende de ce pauvre Théâtre-Historique, qui a été un instant, vous vous le rappelez bien, la terreur du Théâtre-Français et l’exemple des autres théâtres.

S’il avait eu des chutes, il eût été soutenu par ces grands souteneurs de chutes qu’on appelle directeurs des beaux-arts : il n’avait eu que des succès, les directeurs des beaux-arts l’ont abandonné.

Voici donc comment la chose était arrivée. En 1845 ou 1846, je ne me rappelle plus bien, je donnais, au théâtre de l’Ambigu, mes premiers Mousquetaires.

M. le duc de Montpensier assistait à la première représentation. Un de mes bons amis, le docteur Pasquier, était son chirurgien. Après le cinquième ou sixième tableau, le duc de Montpensier m’envoya Pasquier pour me féliciter. Après la pièce, qui avait fini à deux heures du matin, Pasquier revint me dire que M. de Montpensier m’attendait dans sa loge. J’y montai.

J’avais très-peu connu M. le duc de Montpensier ; lorsque, le 13 juillet 1842, son frère était mort, c’était presque un enfant encore, il avait dix-sept ou dix-huit ans ; seulement, par les traditions fraternelles du duc d’Aumale et du prince de Joinville, il savait que son frère avait eu pour moi une grande amitié.