mais, comme disait Michel, la plus belle gorge du département de Seine-et-Oise.
En effet, Portugo — c’était son nom — avait une des plus belles voix de basse qui eussent jamais été entendues sur la piste d’un lapin, d’un lièvre ou d’un chevreuil ; quelquefois, la nuit, pendant que je travaillais, cette voix majestueuse se faisait entendre dans les environs, et c’était une voix à réjouir saint Hubert dans son tombeau. Que faisait Portugo à cette heure, et pourquoi veillait-il quand le reste de la meute dormait ? Ce mystère me fut révélé un matin.
— Monsieur, me dit Michel, voudrait-il manger à son déjeuner une jolie gibelotte ?
— Bon ! lui demandai-je, est-ce que Vatrin a envoyé des lapins ?
— Ah bien, oui, M. Vatrin, il y a plus d’un an que je ne l’ai
vu.
— Eh bien, alors ?
— Monsieur n’a pas besoin de savoir d’où vient le lapin, pourvu que la gibelotte soit bonne.
— Prenez garde, Michel ! lui dis-je, vous vous ferez pincer, mon ami.
— Ah ! par exemple ! Monsieur, je n’ai pas seulement touché une fois mon fusil depuis la fermeture de la chasse.
Je vis que Michel avait son parti pris de ne rien dire ce jour-là ; mais je connaissais Michel, et je savais bien qu’un jour ou l’autre il desserrerait les dents.
— Eh bien, oui, Michel, lui dis-je, je mangerais volontiers ce matin une gibelotte.