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HISTOIRE DE MES BÊTES.

Je lui avais crevé les deux yeux sans lui faire aucune autre blessure.

Je lui allongeai sur la nuque ce fameux coup, qui lui servit à lui comme lièvre, quoique Arnal l’ait appelé depuis le coup du lapin ; puis je rechargeai mon fusil, le cœur bondissant, la main tremblante…

Je devrais peut-être arrêter là mon récit, puisque mon premier lièvre est tué ; mais, à mon avis, la narration serait incomplète.

Je disais donc que je rechargeai mon fusil, le cœur bondissant, la main tremblante. Il me sembla que la charge était un peu forte ; mais j’étais sûr du canon de mon fusil, et cet excédant de quatre ou cinq lignes me donnait la chance de tuer plus loin.

À peine étais-je replacé, que je vis venir un autre lièvre droit à moi.

J’étais guéri de la manie de les tirer en tête ; d’ailleurs, celui-là promettait de me passer à vingt-cinq pas en plein travers.

Il tint sa promesse ; j’ajustai avec plus de calme qu’on n’eût pu attendre d’un débutant et que je n’attendais de moi-même, et je fis feu, convaincu que j’avais ma paire de lièvres.

L’amorce brûla, mais le coup ne partit point.

J’épinglai mon fusil, je l’amorçai et j’attendis.

M. Mocquet connaissait la place et ne l’avait pas surfaite.

Un troisième lièvre venait sur les traces de ses devanciers.

Comme le dernier, il me passa en plein travers à vingt pas ; comme le dernier, je l’ajustai ; comme pour le dernier, l’amorce seule brûla.