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HISTOIRE DE MES BÊTES.

aux mains des Anglais pour retrouver la comtesse de Salisbury ?

Potich fut pardonné en considération de son repentir.

Michel le prit par la peau du cou et le jeta dans la cage, où il fit sa rentrée sans que le dernier des Laidmanoir et mademoiselle Desgarcins daignassent faire attention à sa compagnie.

Quand la guenon n’aime pas, il parait qu’elle est presque aussi cruelle que la femme.

Restait Mysouff.

Mysouff, oublié dans la volière, continuait de croquer, avec l’indifférence d’un criminel endurci, les bengalis, les damiers et les veuves.

Il avait fait, comme le vicomte de V…, un déjeuner de cinq cents francs.

Vous allez me demander, chers lecteurs, ce que signifie la comparaison.

Eh bien, le vicomte de V…, frère du comte Horace de V…, et l’un des plus fins gourmets de France, — non-seulement de France, mais d’Europe, non-seulement d’Europe, mais du monde entier, — hasarda un jour, dans une réunion, — moitié artistes, moitié gens du monde, — cette proposition :

— Un homme seul peut manger un dîner de cinq cents francs.

On se récria.

— Impossible, dirent deux ou trois voix.

— Il est bien entendu, reprit le vicomte, que dans le mot manger est sous-entendu le mot boire.

— Parbleu !

— Eh bien, je dis qu’un homme, quand je dis un homme je ne parle pas d’un charretier, n’est-ce pas ? je sous-entends un