Page:Dumas, Marie - Histoire de mes bêtes, 1878.djvu/141

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
133
HISTOIRE DE MES BÊTES.

» Si donc, Monsieur, vous pouviez me retirer de ce chien de pays, où l’on n’ose pas passer près des buissons et où l’on est rongé de vermine, vous rendriez bien service à votre pauvre Alexis, qui vous demande cette faveur au nom de la bonne madame Dorval que vous aimiez tant, et que j’ai appris par les gazettes que nous avions eu le malheur de perdre.

» Je crois, si vous vouliez vous en occuper un peu, que cela ne serait pas bien difficile, attendu que, ne faisant pas un bien bon soldat, je crois que mes supérieurs ne tiennent pas beaucoup à moi. Il faudrait vous adresser en ce cas, monsieur et ancien maître, à mon colonel, dont vous trouverez l’adresse ci-dessous.

» On n’aura pas beaucoup de peine à me reconnaître sur votre désignation. Je suis le seul nègre du régiment.

» Quant à ma manière de retourner à Paris, ne vous en inquiétez pas. Une fois ayant mon congé, on me donnera gratis passage sur un bâtiment jusqu’à Toulon ou jusqu’à Marseille. Une fois à Toulon ou à Marseille, j’irai à Paris, cum pedibus et jambibus.

» Mon fourrier m’explique que cela veut dire sur mes pieds et mes jambes.

» Maintenant, monsieur et ancien maître, si j’étais assez heureux de rentrer chez vous, je m’engage solennellement à vous servir pour rien s’il le faut, et à vous mieux servir, je m’en vante, que quand vous me donniez trente francs par mois.

» Si, cependant, dans votre désir de me revoir plus vite, vous vouliez m’envoyer quelque monnaie, afin de ne pas prendre