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ASCANIO.

pour aller causer avec vous et admirer vos chefs-d’œuvre.

— Comment, sire, interrompit madame d’Étampes, mais vous privez là sans motif d’un bien qui lui appartient un homme à moi, un gentilhomme !

Benvenuto la regarda, et pour la seconde fois Anne baissa les yeux sous ce singulier coup d’œil fixe et pénétrant. Cellini reprit avec la même naïve bonne foi qu’en parlant de ses apparitions :

— Mais je suis noble aussi, moi, madame : ma famille descend d’un gâlant homme premier capitaine de Jules César, nommé Fiorino, qui était de Cellino, près Montefiascone, et qui a donné son nom à Florence, tandis que votre prévôt et ses aïeux n’ont, si j’ai bonne mémoire, encore donné leur nom à rien. Cependant, continua Benvenuto en se retournant vers François Ier et en changeant à la fois de regard et d’accent, peut-être me suis-je montré bien hardi, peut-être exciterai-je contre moi des haines puissantes, et qui, malgré la protection de Votre Majesté, pourraient m’accabler à la fin. Le prévôt de Paris a, dit-on, une espèce d’armée à ses ordres.

— On m’a raconté, interrompit le roi, qu’un jour, à Rome, un certain Cellini, orfèvre, avait gardé, faute de paiement, un vase d’argent que lui avait commandé monseigneur Farnèse, alors cardinal et aujourd’hui pape.

— C’est vrai, sire.

— On ajoutait que toute la maison du cardinal s’en vint l’épée au poing assiéger la boutique de l’orfèvre pour emporter le vase de vive force.

— C’est encore vrai.

— Mais ce Cellini, en embuscade derrière la porte, et l’escopette au poing, s’était défendu vaillamment, avait mis