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ASCANIO.

— Vous émaillez l’or ? dit Marguerite.

— Comme Amerigo de Florence.

— Vous gravez les cachets ? dit Catherine.

— Comme Lantizco de Perouse. Croyez-vous donc, madame, que mon talent se borne aux fins joyaux d’or et aux grandes pièces d’argent ? Je sais faire un peu de tout, grâce à Dieu ! Je suis ingénieur militaire passable, et j’ai empêché deux fois qu’on ne prît Rome. Je tourne assez bien un sonnet, et Votre Majesté n’a qu’à me commander un poème, pourvu qu’il soit à sa louange, et je m’engage à l’exécuter ni plus ni moins que si je m’appelais Clément Marot. Quant à la musique, que mon père m’enseignait à coups de bâton, la méthode m’a profité, et je joue de la flûte et du cornet avec assez de talent pour que Clément VII m’ait engagé à vingt-quatre ans au nombre de ses musiciens. J’ai trouvé de plus un secret pour faire d’excellente poudre, et je puis fabriquer aussi des escopettes admirables et des instrumens de chirurgie. Si Votre Majesté a la guerre et qu’elle veuille m’employer comme homme d’armes, elle verra que je ne suis pas maladroit, et que je sais aussi bien manier une arquebuse que pointer une coulevrine. Comme chasseur, j’ai tué jusqu’à vingt-cinq paons dans un jour, et comme artilleur, j’ai débarrassé l’empereur du prince d’Orange, et Votre Majesté du connétable de Bourbon, les traîtres n’ayant pas, à ce qu’il paraît, de bonheur avec moi.

— Ah çà ! de quoi êtes-vous le plus fier, interrompit le jeune dauphin, est-ce d’avoir tué le connétable ou d’avoir abattu les vingt-cinq paons ?

— Je ne suis fier ni de l’un ni de l’autre, monseigneur.