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ASCANIO.

hâte, habillons-nous pour le bal ; c’est le prévôt qui paiera les flûtes.

— Hourrah ! crièrent tous les compagnons.

Alors ce fut dans l’atelier un mouvement, un tumulte, un remue-ménage admirables à voir : la verve et l’entrain du maître animaient tous les cœurs et tous les visages. On essayait des cuirasses, on brandissait des épées, on tirait des poignards, on riait, on chantait, à croire qu’il s’agissait d’une mascarade ou d’une fête. Benvenuto allait, venait, courait, enseignant une botte à l’un, bouclant le ceinturon de l’autre, et sentant son sang courir libre et chaud dans ses veines comme s’il avait retrouvé sa véritable vie.

Quant aux ouvriers, c’étaient entre eux des plaisanteries à n’en plus finir qu’ils se jetaient sur leurs mines guerrières et leurs maladresses bourgeoises.

— Eh ! maître, regardez donc, criait l’un ; regardez donc Simon-le-Gaucher qui met son épée du même côté que nous ! À droite, donc ! à droite !

— Et Jehan, répondait Simon, qui tient sa hallebarde comme il tiendra sa crosse quand il sera évêque !

— Et Pagolo ! disait Jehan, qui met double cotte de mailles !

— Pourquoi pas ? répondait Pagolo : Hermann l’Allemand s’habille bien comme un chevalier du temps de l’empereur Barberousse.

Et en effet, celui qu’on venait de désigner sous l’appellation d’Hermann l’Allemand, épithète qui formait quelque peu pléonasme, puisque le nom seul, par sa consonnance germanique, indiquait que celui qui le portait appartenait à quelqu’uns des cercles du Saint-Empire, Hermann,