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ASCANIO.

— Et quand je vous ai vu si joyeux, avec votre futur gendre, le comte d’Orbec, car le mariage de votre fille avec lui n’est plus un secret, et je vous en félicite, mon cher d’Estourville…

— Vous savez que je vous avais dit depuis longtemps que la main de Colombe était promise, mon cher Marmagne.

— Oui, je ne sais vraiment comment vous consentez à vous séparer d’une si charmante enfant.

— Oh ! je ne m’en sépare pas, reprit maître Robert. Mon gendre, le comte d’Orbec, fera passer la Seine à toute sa trésorerie, et viendra habiter le Grand-Nesie, tandis que moi, dans mes momens perdus, j’habiterai le Petit.

— Pauvre ami ! dit Marmagne en secouant la tête d’un air profondément peiné, en appuyant une de ses mains sur le bras du prévôt, et en portant l’autre à ses yeux pour essuyer une larme qui n’existait pas.

— Comment, pauvre ami, dit messire Robert. Ah çà ! qu’avez-vous donc encore à m’annoncer ?

— Suis-je donc le premier à vous annoncer cette fâcheuse nouvelle ?

— Laquelle ? voyons, parlez !

— Vous le savez, mon cher prévôt, il faut être philosophe en ce monde, et il y a un vieux proverbe que notre pauvre race humaine devrait avoir sans cesse à la bouche, car il renferme à lui seul toute la sagesse des nations.

— Et quel est ce proverbe ? Achevez.

— L’homme propose, mon cher ami, l’homme propose et Dieu dispose.

— Et quelle chose ai-je proposée dont Dieu disposera ? voyons, achevez et finissons-en.