devait, assurait-on, qu’à l’extension peu morale qu’il donnait à sa charge. D’ailleurs, le vicomte de Marmagne avait depuis longtemps mangé tout son patrimoine, et n’avait pas d’autre fortune que les libéralités de François Ier. Or ces libéralités pouvaient tarir d’un jour à l’autre, et messire Robert d’Estourville n’était pas si fou que de se fier dans les choses de cette importance aux caprices d’un roi fort sujet aux caprices. Il avait donc tout doucement repoussé la demande du vicomte de Marmagne, en lui avouant confidentiellement et sous le sceau du secret que la main de sa fille était déjà depuis longtemps engagée à un autre. Grâce à cette confidence, qui motivait le refus du prévôt, le vicomte de Marmagne et sire Robert d’Estourville étaient restés en apparence les meilleurs amis du monde, quoique depuis ce temps le vicomte détestât le prévôt et que de son côté le prévôt se défiât du vicomte, lequel sous son air affable et souriant n’avait pu cacher sa rancune à un homme aussi habitué que l’était messire Robert à lire dans l’ombre des cours et dans l’obscurité des cœurs. Chaque fois qu’il voyait paraître le vicomte, le prévôt s’attendait donc, sous son air affable et prévenant, à recevoir un porteur de mauvaises nouvelles, lesquelles il avait l’habitude de débiter les larmes aux yeux et avec cette douleur feinte et calculée qui exprime goutte à goutte le poison sur une plaie.
Quant au comte d’Orbec, le vicomte de Marmagne avait à peu près rompu avec lui : c’était même une de ces rares inimitiés de cour visibles à l’œil nu. D’Orbec méprisait Marmagne, parce que Marmagne n’avait pas de fortune et ne pouvait tenir un rang. Marmagne méprisait d’Orbec, parce que d’Orbec était vieux et avait par conséquent per-