Page:Dumas, Ascanio, 1860.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
112
ASCANIO.

priété-là ? Tu devrais faire régulariser ton titre : autant que je me rappelle, le roi ne te l’a pas donnée, après tout.

— Il ne me l’a pas donnée, c’est vrai, reprit en riant le prévôt, mais il me l’a laissé prendre, et c’est à peu près tout comme.

— Oui, mais si quelqu’autre te jouait le tour de lui faire cette demande en règle ?

— Oh ! celui-là serait mal reçu, je t’en réponds, à venir faire valoir son titre, et sûr comme je le suis de l’appui de madame d’Étampes et du tien, je le ferais grandement repentir de ses prétentions. Non, va, je suis tranquille, et l’hôtel de Nesle m’appartient, aussi vrai, cher ami, que ma fille Colombe est à toi ; pars donc tranquille et reviens vite.

Comme le prévôt disait ces paroles, de la véracité desquelles ni lui ni son interlocuteur n’avaient aucun motif de douter, un troisième personnage, conduit par le jardinier Raimbault, parut sur le seuil de la porte qui donnait de la cour quadrangulaire dans les jardins du Grand-Nesle. C’était le vicomte de Marmagne.

Celui-là était aussi un prétendant de Colombe, mais un prétendant malheureux. C’était un grand bélître d’un blond ardent avec des couleurs roses, suffisant, insolent, bavard, plein de prétentions auprès des femmes, auxquelles il servait souvent de manteau pour cacher leurs véritables amours, plein d’orgueil de sa position de secrétaire du roi, laquelle position lui permettait d’approcher de Sa Majesté à la manière dont l’approchaient ses lévriers, ses perroquets, et ses singes. Aussi le prévôt ne s’était-il pas trompé à cette faveur apparente et à cette familiarité superficielle dont il jouissait près de Sa Majesté, faveur et familiarité qu’il ne