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ASCANIO.

Pendant ce temps le prévôt et le comte commençaient à leur tour la visite du Grand-Nesle, que venaient de faire une heure auparavant dame Perrine et Ascanio.

Ce serait une étrange chose si les murs, qui à ce que l’on prétend ont des oreilles, avaient aussi des yeux et une langue, et racontaient à ceux qui entrent ce qu’ils ont vu et entendu de ceux qui sortent.

Mais comme les murs se taisaient et regardaient le prévôt et le trésorier en riant peut-être à la manière des murs, c’était le susdit trésorier qui parlait.

— Vraiment, disait-il tout en traversant la cour qui menait du Petit au Grand-Nesle, vraiment elle est fort bien, la petite ; c’est une femme comme il m’en faut une, mon cher d’Estourville, sage, ignorante et bien élevée. Le premier orage passé, le temps se remettra au beau fixe, croyez-moi. Je m’y connais ; toutes les petites filles rêvent un mari jeune, beau, spirituel et riche. Eh ! mon Dieu ! j’ai au moins la moitié des qualités qu’on exige de moi. Peu d’hommes peuvent en dire autant, c’est donc déjà beaucoup. Puis, passant de sa femme future à sa propriété à venir, et parlant avec le même accent grêle et convoiteur de l’une et de l’autre : C’est comme ce vieux Nesle, continua-t-il, c’est sur mon honneur ! un magnifique séjour, et je t’en fais mon compliment. Nous serons là à merveille, ma femme, moi et toute ma trésorerie. Voilà pour notre habitation personnelle, voilà pour mes bureaux, voilà pour la valetaille. Seulement, tout cela est un peu bien dégradé. Mais avec quelques dépenses que nous trouverons moyen de faire payer à Sa Majesté, nous en tirerons un excellent parti. À propos, d’Estourville, es-tu bien sûr de conserver cette pro-