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les ayent ignorés, peut-on croire que les Juifs qui ont dû en être témoins oculaires, ne se soient pas rendus à l’évidence même, et ayent pu traiter Jésus avec ignominie comme un séducteur et un perturbateur du repos public ? On me répond que cette ignominie même prouve la divinité de Jésus, puisqu’elle est prédite par les prophètes ; et on ajoute que la vie de Jésus-Christ n’est qu’un tissu d’événemens dont chacun est l’accomplissement des prophéties de l’ancienne loi. Je nie formellement que les Juifs ayent jamais pu penser que le Messie dût être traité ignominieusement et mis à mort ; au contraire ils l’attendoient comme un héros qui devoit conquérir toute la terre et lui faire porter le joug de la Judée. C’est de cette sorte que tous les prophètes l’annonçoient ; et cette idée s’accorde parfaitement avec les biens temporels qui doivent être la seule récompense des Juifs, dans la loi de Moïse. Je conviens qu’il y a des passages où il est dit que le Messie sera méconnu et méprisé par son peuple ; mais il y a ici une équivoque, qu’il faut éclaircir. Le nom de Messie que les chrétiens ont si hardiment appliqué à Jésus seul, étoit un nom général, qui se donnoit à tous ceux qui passoient pour être envoyés de dieu. Il ne signifie autre chose qu’envoyé ; et dans ce sens il s’applique à tous les prophètes qui exhortoient les Juifs à quitter l’idolâtrie et à rentrer dans la loi de Moïse. Ces prophètes souvent éprouvèrent la fureur du peuple, et c’est l’exemple qu’ils en voyent qui leur a fait dire en quelques endroits que l’envoyé de dieu seroit en opprobre,