Page:Duliani - La ville sans femmes, 1945.djvu/27

Cette page a été validée par deux contributeurs.
25
NOCTURNE

tion italienne contre l’Allemagne et l’Autriche. Il n’y a pas longtemps encore, il disait que…

— Oui, oui, oui, tout cela est très beau, mais les indices deviennent de plus en plus alarmants. On vient de suspendre le départ des paquebots faisant le service entre Naples et New-York. La presse fasciste, qui obéit à un mot d’ordre, devient de plus en plus violente contre la France… Il n’est bruit que de mobilisation partielle, prélude de la mobilisation générale… Pensez donc ! l’Italie dispose de huit millions de baïonnettes, de milliers d’avions, de plusieurs divisions cuirassées…

— Mais vous voyez bien que l’Allemagne et la Russie sont unies par un traité secret… Hitler peut s’entendre avec Staline. Mussolini ne le suivra jamais !

Et ainsi, pendant des heures et des heures, toutes les éventualités étaient pesées, supputées, examinées, faisant alterner dans le cœur de ces Italiens le doute et l’espoir, la crainte et un fugace sentiment de sécurité, car aucun d’entre eux n’aurait vraiment voulu que l’Italie changeât sa politique traditionnelle, la politique d’union à la France et à l’Angleterre, qui avait permis à un peuple divisé et dominé par l’étranger de reconstituer sa propre unité et de créer chez lui une vie prospère en l’espace d’à peine un demi-siècle. Mais on avait beau raisonner, discuter, questionner, les nouvelles de Rome devenaient de plus en plus mauvaises.

Les plus clairvoyants regardaient avec une angoisse croissante les lignes de défense de la France tomber les unes après les autres. Et ils pensaient :