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LA VILLE SANS FEMMES

ou quatre des camarades s’en donnèrent tellement à cœur joie qu’ils ne tardèrent pas à tomber dans les vignes du Seigneur ! Le pire fut que le sergent-major, à qui on rapporta l’incident, fit irruption dans la baraque. Et cela leur coûta une semaine d’arrêts. Petits inconvénients de la situation !

Il y avait aussi les débrouillards qui se faisaient envoyer des prunes en conserve dans le vin et des olives dans le scotch. Dans l’ensemble des récipients qui arrivaient au cours d’une journée, ces fraudeurs parvenaient à passer leur contrebande sans provoquer les soupçons de l’officier chargé de la vérification. D’autres encore recevaient de leur famille des gâteaux ou des tartes confectionnés avec du kirsch, du cognac ou d’autres liqueurs. Plus que cela, comme il est certain qu’il y a partout des gens qui savent toujours se tirer d’affaires et que rien n’arrête, trois ou quatre des camarades parvenaient à faire entrer un gallon entier de vin. C’était alors des petits festins dans des coins retirés où la surveillance était moins à craindre. Quelques gorgées suffisaient à donner un peu de détente à l’esprit et à provoquer une gaîté qui, pour être factice, n’en était pas moins salutaire.

***

Plus émouvante était l’heure de la distribution du courrier. Au début, les lettres nous parvenaient assez rapidement. Puis, par suite de certains ajustements administratifs qui, par bonheur, ne furent pas de longue