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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

chez avec cette demoiselle, cela n’est pas trop secundum Lucam. » Je pris une assiette, je la jetais à la tête du prédicateur, si Ariste ne m’eût retenue. Mon amant, un peu formalisé de l’instruction pastorale de son homme noir, lui dit : « Mon bon curé, tâchez d’entretenir la paix avec votre servante, ne vous mêlez point de mes affaires ; quelle autorité avez-vous pour prêcher dans ma maison ? » Le curé lui répondit d’un air mystique : « Je suis le serviteur du Seigneur. » — « Cela est bon, dit Ariste ; je parlerai à votre maître, je le prierai, aussitôt que votre année sera finie, de vous payer et de vous mettre à la porte ; il n’a que faire d’un insensé et d’un visionnaire chez lui. » Le curé s’en alla en grommelant dans les dents.

Dès que le curé fut parti, je demandai au philosophe pourquoi cet homme lui avait défendu de m’aimer. — « C’est à cause que je ne puis coucher avec toi sans sa permission. — Va, il ne t’aime pas comme moi. — Ma religion m’ordonne de lui obéir. — Pourquoi te laisses-tu commander par ta religion ! Il me paraît qu’avec ta belle cave, tu n’es pas si heureux que je l’étais dans celle où tu m’as élevée… après tout qui est cet homme ? — C’est un curé à qui nous donnons du bien… » J’interrompis Ariste : « Comment tu es assez étourdi pour payer un homme qui t’injurie et empêche tes plaisirs ? »

Le philosophe, content de mes progrès, me fit annoncer dans son voisinage pour une fille nouvellement arrivée des terres australes ; on me courut